dimanche 21 juin 2009

Shiva - Divinité suprême 1 de 3

Shiva (sanskrit शिव Śiva) — transcrit parfois par Siva ou Çiva, « le bon, le gentil, qui porte bonheur » — est un dieu hindou, un des membres de la Trimoûrti avec Brahma et Vishnou.

Pour les shivaïtes, Çiva est la personnification de l'Absolu, le principe destructeur et en même temps régénérateur du monde, dispensateur de mort et de renaissance.

C'est le dieu de la destruction. Il est représenté avec un troisième œil, symbole de sagesse, au milieu du front et avec un cobra autour du cou. Il porte un trident (trishula) et tient un petit instrument de percussion (damaru). Il est assis sur une peau de tigre, symbole de l'énergie potentielle. Shiva représente en effet la source créatrice en sommeil.

De sa chevelure, dans laquelle se trouve un croissant de lune, symbole du cycle du temps, s'écoule le Gange, fleuve sacré de l'hindouisme. Sa monture est le taureau Nandi qui fait lui-même l'objet d'un culte. Shiva est un personnage complexe et contradictoire. Il représente la destruction mais celle-ci a pour but la création d'un monde nouveau. L'emblème de Shiva est d'ailleurs le lingam (un phallus), symbole de la création. Il a les yeux mi-clos car il les ouvre lors de la création du monde et les ferme pour mettre fin à l'univers et amorcer un nouveau cycle.


Shiva est représenté sous différente forme (l'ascétique, le yogi, le mendiant...) et possède, d'après les textes, 1008 noms (Shambhu, Shankara, Pashupati…). L'une des plus célèbres est le Shiva Nataraja, danseur cosmique qui rythme la destruction et la création du monde. Il est alors représenté avec 4 bras. La main supérieure droite tient un tambour (damaru) qui rythme la création; la main gauche supérieure tient la flamme de la destruction (samhara); la main inférieure droite est tenue dans un geste de protection (abhaya mudra); la main inférieure gauche pointe vers le pied gauche tenu en l'air, il montre ainsi son pouvoir de grâce. Sous son pied droit il écrase un nain-démon symbole de l'ignorance. Son immense chevelure montre son pouvoir et il est entouré d'un cercle de feu (prabhamandala).

Shiva est marié à Shakti (hindouisme), la déesse-mère. Elle-même a plusieurs noms suivant la fonction qu'elle occupe (Parvati, Durga, Kali). Il a deux fils, nés de Parvati : Ganesh et Skanda. Ganesha a cependant la particularité d'avoir été conçu de façon immaculée, sans l'intervention de Shiva. La famille vit au sommet du Mont Kailasa dans l'Himalaya.

Parmi les attributs de Shiva, on trouve :

* son chignon ─ jatâmukuta (jaṭāmukuṭa) ─ le siège de son pouvoir d'ascète,
* le croissant de lune accroché à sa chevelure,
* le troisième œil fermé car son regard détruit,
* le cobra Kundalinî (kuṇḍalinī), l'énergie primordiale divine, comme collier. En sanskrit Kundalini signifie celle qui est entourée sur elle-même, d'où le symbole du serpent. Elle représente le principe féminin divin, Shiva étant le principe masculin.
* une peau de tigre symbolisant sa maîtrise de la Nature.

Comme ascète mais aussi comme seigneur des lieux de crémation, il se couvre le corps de cendre. Shiva protège la terre de la force de Gangâ, le Gange (Gaṅgā) ; il calme l'ardeur de ses flots en les filtrant dans les boucles de ses cheveux. Il porte souvent une conque dans une main et possède un trident, symbole qui concentre, pour ses adorateurs, les pouvoirs de la trimûrti, c'est-à-dire création, perpétuation et destruction.

D'après la légende, Shiva et Vishnou se rendirent dans une forêt pour combattre 10 000 hérétiques. Furieux, ceux-ci envoyèrent pour attaquer Shiva un tigre, un serpent et un nain noir et féroce armé d'une massue. Shiva tua le tigre ─ il est traditionnellement assis sur une peau de tigre, car maître de la nature Pashupati ─ apprivoisa le serpent qu'il mit autour de son cou en guise de collier (symbole de la maîtrise des passions), posa son pied sur le nain et réalisa une danse développant une telle puissance que le nain et les hérétiques reconnurent en lui leur seigneur.

Shiva est parfois représenté mêlé avec sa Shakti (hindouisme) formant un être hermaphrodite, Ardhanari.


Shiva est habituellement représenté par un phallus stylisé, appelé shiva lingam (liṅgaṃ), symbole de création associé à la yoni, une dalle de pierre représentant l'organe féminin, la matrice du monde. Par l'union du linga et de la yoni, l'Absolu qui se déploie dans le monde prouve qu'il surmonte l'antagonisme mâle-femelle ou spirituel-matériel. Le linga représente également le cosmos, mais aussi le pouvoir de connaître, la conscience comme axe de la réalité. Non plus orienté vers la finalité naturelle de force de vie et d'incarnation, le phallus dressé vers le ciel représente le rassemblement des énergies du yogi sur le plan sensible et leur conversion vers un niveau subtil.

Dans l'Inde ancienne, le lingam était le symbole du phallus, représentant le principe créateur originel tel que l'incarne Shiva, le dieu du Vivant[1].

Ce symbole phallique constitue un rappel des anciens cultes préhistoriques de la fécondité, et son image sculptée est, dans sa stylisation, très éloignée de la nature : le lingam ressemble en fait à un tronçon de colonne, et rappelle parfois le symbole méditerranéen de l'omphalos[1].

Le symbole du lingam peut aussi être perçu comme la représentation de l'axe du monde. Dans la considération d'un couple d'opposés qui réunit en une unité la polarité des deux sexes, le culte de Shiva associe ainsi le lingam au symbole du yoni, sous la forme d'une colonne entourée à sa base d'un anneau de pierre (cette image figure l'union des éléments masculins et féminins originels, union sur laquelle repose toute vie)[1].

Dans le shivaïsme brahmanique, les caractères phalliques fondamentaux du linga se retrouvent toujours nettement, tant dans les légendes expliquant l'origine de ce culte que dans les qualités corporelles occasionnellement attribuées au dieu. C'est ainsi que Shiva, ayant trouvé toutes les créatures créées, s'irrita, arracha son organe génital et le cacha dans la terre pour se vouer à une vie ascétique.

À l'origine, raconte pour sa part le Linga Purana, lorsque l'univers était envahi par les eaux, Vishnou et Brahmâ se disputaient, affirmant chacun qu'il était le plus grand des dieux. Mais tout à coup, surgit une immense colonne de feu entre les eaux. Elle était si haute qu'elle semblait sans fin. Les deux dieux décidèrent de s'affronter en mesurant la hauteur de la colonne : Vishnou se transforma en sanglier et plongea au fond des eaux tandis que Brahmâ prit la forme d'une oie pour voler aussi haut que possible. Mais ni l'un, ni l'autre ne purent atteindre l'extrémité de la colonne incandescente. Shiva, apparaissant alors, expliqua qu'il s'agissait du lingam, symbole de son pouvoir mais aussi Shiva lui-même. Les dieux reconnurent alors la suprématie de Shiva, qui leur adressa un discours censé instituer les principales règles de son culte (Nuit Sainte de Shiva, processions, instaurations de statures, etc.)

Une autre légende raconte que Shiva apparut nu devant un groupe d'ascètes qui méditaient dans la forêt sans comprendre sa vraie grandeur. Pour les punir, Shiva décida de séduire leurs femmes. Pour se venger, les ascètes émasculèrent Shiva en invoquant un tigre, mais à l'instant où son lingam tombe à terre, l'univers fut plongé dans les ténèbres. Les yogi, enfin conscients de leur erreur, prièrent Shiva de restaurer la lumière dans le monde. Celui-ci accepta, à condition que les ascètes l'adorent sous la forme du lingam.

La secte shivaïte du Lingâyat ( du sanscrit lingavantha, « ceux qui portent un lingam »), fondée au XIe siècle en Inde du Sud, se consacre exclusivement à l'adoration du lingam créateur, que l'on conserve souvent dans un récipient, et qui sert d'amulette [2]. À l'opposé des conceptions européennes judéo-chrétiennes, cette secte est réputée en Inde pour être d'un niveau spirituel et moral très élevé. On voit parfois le serpent Kundalini, symbole de la force vitale et lové au bas de la colonne vertébrale, engloutir le lingam, ce qui symbolise l'union de l'esprit et de la matière, union qu'on ne peut atteindre qu'au prix d'une sévère discipline spirituelle selon les prescriptions du yoga.

La vénération de Shiva Mahalinga est encore de nos jours très vivante en Inde : de nombreux pèlerins vont adorer le membre reproducteur du Dieu, que l'on peut apercevoir dans la grotte d'Armanath, dans les montagnes du Cachemire. D'après la légende, Shiva était apparu dans cette grotte au commencement des temps, sous la forme d'une colonne de feu qui s'était ouverte pour libérer son image. Les pèlerins peuvent maintenant voir dans la grotte une stalagmite de forme phallique.

Ainsi, le lingam est une représentation religieuse tout à fait commune en Inde, sans que le caractère sexuel soit minimisé ou occulté. Pierres, galets ou fourmilières constituent les lieux d'érection de lingams « spontanés ». Les lingams svayambhû (« automanifestés ») sont les plus sacrés, à l'image de celui d'Amarnath, une formation de glace naturelle.

Après la découverte de documents khmers (Cambodge) datant du Moyen Âge, on a pu établir aussi la présence du lingam de Shiva au centre de la ville d'Angkor. Cette ville était disposée en forme de carré, qui était alors considéré comme la structure du monde.

Le lingam est souvent oint de lait et de ghî (beurre clarifié) ou entouré de fruits, de sucreries, de feuilles et de fleurs.